La Quarantaine du mois de Ramadan (2/2)

11 octobre 2025
Par Seyyed Fouzi
Exégèse Coranique
Spiritualité Islamique
Patience
Moise
Laylat Al-Qadr
Nuit du Destin
Révélation

Versets Cités (3)

وَإِذْ وَٰعَدْنَا مُوسَىٰٓ أَرْبَعِينَ لَيْلَةً ثُمَّ ٱتَّخَذْتُمُ ٱلْعِجْلَ مِنۢ بَعْدِهِۦ وَأَنتُمْ ظَـٰلِمُونَ

wa-idh wāʿadnā mūsā arbaʿīna laylatan thumma ittakhadhtumu l-ʿij'la min baʿdihi wa-antum ẓālimūna

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

Et [rappelez-vous] lorsque Nous donnâmes rendez-vous à Moïse pendant quarante nuits!... Puis en son absence vous avez pris le Veau pour idole alors que vous étiez injustes (à l'égard de vous-mêmes en adorant autre qu'Allah).

وَظَلَّلْنَا عَلَيْكُمُ ٱلْغَمَامَ وَأَنزَلْنَا عَلَيْكُمُ ٱلْمَنَّ وَٱلسَّلْوَىٰ ۖ كُلُوا۟ مِن طَيِّبَـٰتِ مَا رَزَقْنَـٰكُمْ ۖ وَمَا ظَلَمُونَا وَلَـٰكِن كَانُوٓا۟ أَنفُسَهُمْ يَظْلِمُونَ

waẓallalnā ʿalaykumu l-ghamāma wa-anzalnā ʿalaykumu l-mana wal-salwā kulū min ṭayyibāti mā razaqnākum wamā ẓalamūnā walākin kānū anfusahum yaẓlimūna

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

Et Nous vous couvrîmes de l'ombre d'un nuage; et fîmes descendre sur vous la manne et les cailles: - «Mangez des délices que Nous vous avons attribués!» - Ce n'est pas à Nous qu'ils firent du tort, mais ils se firent tort à eux-mêmes.

وَإِذْ قُلْتُمْ يَـٰمُوسَىٰ لَن نَّصْبِرَ عَلَىٰ طَعَامٍ وَٰحِدٍ فَٱدْعُ لَنَا رَبَّكَ يُخْرِجْ لَنَا مِمَّا تُنۢبِتُ ٱلْأَرْضُ مِنۢ بَقْلِهَا وَقِثَّآئِهَا وَفُومِهَا وَعَدَسِهَا وَبَصَلِهَا ۖ قَالَ أَتَسْتَبْدِلُونَ ٱلَّذِى هُوَ أَدْنَىٰ بِٱلَّذِى هُوَ خَيْرٌ ۚ ٱهْبِطُوا۟ مِصْرًا فَإِنَّ لَكُم مَّا سَأَلْتُمْ ۗ وَضُرِبَتْ عَلَيْهِمُ ٱلذِّلَّةُ وَٱلْمَسْكَنَةُ وَبَآءُو بِغَضَبٍ مِّنَ ٱللَّهِ ۗ ذَٰلِكَ بِأَنَّهُمْ كَانُوا۟ يَكْفُرُونَ بِـَٔايَـٰتِ ٱللَّهِ وَيَقْتُلُونَ ٱلنَّبِيِّـۧنَ بِغَيْرِ ٱلْحَقِّ ۗ ذَٰلِكَ بِمَا عَصَوا۟ وَّكَانُوا۟ يَعْتَدُونَ

wa-idh qul'tum yāmūsā lan naṣbira ʿalā ṭaʿāmin wāḥidin fa-ud'ʿu lanā rabbaka yukh'rij lanā mimmā tunbitu l-arḍu min baqlihā waqithāihā wafūmihā waʿadasihā wabaṣalihā qāla atastabdilūna alladhī huwa adnā bi-alladhī huwa khayrun ih'biṭū miṣ'ran fa-inna lakum mā sa-altum waḍuribat ʿalayhimu l-dhilatu wal-maskanatu wabāū bighaḍabin mina l-lahi dhālika bi-annahum kānū yakfurūna biāyāti l-lahi wayaqtulūna l-nabiyīna bighayri l-ḥaqi dhālika bimā ʿaṣaw wakānū yaʿtadūna

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

Et [rappelez-vous] quand vous dîtes: «O Moïse, nous ne pouvons plus tolérer une seule nourriture. Prie donc ton Seigneur pour qu'Il nous fasse sortir de la terre ce qu'elle fait pousser, de ses légumes, ses concombres, son ail (ou blé), ses lentilles et ses oignons!» - Il vous répondit: «Voulez-vous échanger le meilleur pour le moins bon? Descendez donc à n'importe quelle ville; vous y trouverez certainement ce que vous demandez!». L'avilissement et la misère s'abattirent sur eux; ils encoururent la colère d'Allah. Cela est parce qu'ils reniaient les révélations d'Allah, et qu'ils tuaient sans droit les prophètes. Cela parce qu'ils désobéissaient et transgressaient.

La Quarantaine Spirituelle : Une Station d'Attente pour la Nuit du Destin

Introduction

« Cette histoire de Moise et des Enfants d’Isrâ’îl nous apprend une chose essentielle que nous devons garder à l’esprit durant la quarantaine. »

Dans la vidéo précédente, nous avons expliqué les modalités et la nécessité d’accomplir une quarantaine spirituelle (khalwah), une retraite qui débute quarante jours avant la nuit bénie du Destin (Laylatou l-Qadr), c’est-à-dire qui commence pour nous, cette année, aux alentours du 12 février et qui s’achèvera lors de la nuit de la Destinée, vers le 22 mars.

Nous avons tenté d’expliquer pourquoi il était nécessaire aux hommes en quête de proximité divine (qurb) et d’éveil spirituel (yaqẓah) de marquer un arrêt dans notre temps terrestre (zamān mādī), afin de nous élever et de nous ouvrir au temps subtil (zamān laṭīf), au temps de l’Éternel (dahr).

Aujourd’hui, j’aimerais que nous approfondissions la réflexion et la méditation sur ce qu’est vraiment la quarantaine, afin que nous puissions en toucher, en ressentir ou en percevoir les secrets (asrār) qu’elle recèle.

La Quarantaine, une Tradition Prophétique

Nous avons vu que la quarantaine a été accomplie par les prophètes (anbiyā’), les envoyés (mursalūn) et les messagers (rusul).

Notre noble Messager – que la prière et la paix de Dieu soient sur lui – s’est retiré quarante nuits sur le mont Ḥirā’, tout comme le prophète Jésus (ʿĪsā ibn Maryam), dont la Bible nous dit qu’il s’est également retiré dans le désert, où il jeûna quarante jours et quarante nuits.

De même, Moise (Moise) se retira quarante nuits sur le mont Sinaï (Jabal al-Ṭūr), comme l’évoque la révélation coranique, au verset 51 de la Sourate Al-Baqara (La Vache) :
« Et lorsque Nous donnâmes rendez-vous à Moise pour quarante nuits, puis voici qu’après son départ, vous prîtes le veau (al-ʿijl) pour idole, alors même que vous étiez injustes. »

Nous comprenons par là – et il est crucial de le saisir – que la quarantaine est une station d’arrêt, une inertie sacrée, dans l’attente d’un événement qui viendra nous bouleverser, nous transformer, nous métamorphoser.

Durant cette station d’attente, seuls ceux qui ont suspendu leur raisonnement (taʿqīl) et ont ouvert leur cœur, réceptif et prêt à accueillir ce que Dieu leur destinera, pourront atteindre le secret (sirr) et le mystère (ghayb) qui se cachent derrière la quarantaine.

« Un secret et un mystère qui ne se révèlent que lorsque nous sortons du temps terrestre et que le temps subtil (zamān laṭīf) se dévoile. »

Cette quarantaine est donc ce qui nous permettra, par la permission (idhn), la grâce (faḍl) et la miséricorde divine (raḥmah), de nous extraire de ce temps terrestre.

L’Exemple de Moise et les Trois Niveaux de Quarantaine

Prenons l’exemple du prophète Moise (Moise).

Nous savons, d’après les versets cités précédemment, que Moise a gravi cette montagne du Sinaï dans une station d’attente de la révélation de la parole de Dieu (kalām Allāh).

Mais ils n’étaient pas les seuls en quarantaine.

Son frère Aaron (Haroun), le Samiri (as-Sāmirī), ou encore les Enfants d’Isrâ’îl (Banū Isrā’īl) étaient également dans une quarantaine d’attente, chacun à un niveau, un degré, une attente différente :

  1. Aaron (Haroun) :
    Il attendait son frère avec patience et humilité, portant la responsabilité, confiée par Moise, des Enfants d’Isrâ’îl et de leur unité (waḥdah).

  2. Le Samiri (as-Sāmirī) :
    Durant cette attente, il a décidé d’agir en suivant les suggestions de son âme (waswas), en prenant les traces du messager (āthār al-rasūl) pour construire le Veau d’or (al-ʿijl).

  3. Les Enfants d’Isrâ’îl :
    Ils étaient dans l’attente du retour de Moise, afin que Dieu leur ouvre les portes de la Terre Promise (Arḍ al-Mawʿūd).
    Mais ils ont succombé à la tentation que leur a proposée le Samiri.
    Dieu leur a donné une épreuve (Fitna) à laquelle ils ont échoué.
    Pourquoi ?
    Parce que la vision qu’ils avaient de la Terre Promise et du royaume que Moise devait leur apporter était à l’image des royaumes terrestres, du royaume de Pharaon (Firʿawn), dont ils ne seraient plus les esclaves, mais les maîtres, avec les mêmes conditions et le même confort que comportait ce royaume terrestre.

« Ils cherchaient un royaume terrestre, alors que Dieu leur proposait un royaume céleste. »

Et c’est là l’épreuve à laquelle ils ont échoué, préférant le Veau d’or, abandonnant la révélation et leur destinée pour n’en prendre que le moule, que la forme, que la trace, et n’y introduire que leur propre idée, leur propre vision, purement terrestre et matérielle.

Les Traces du Messager et l’Illusion Terrestre

C’est en ce sens que nous pouvons comprendre ce qu’est la trace du messager (āthār al-rasūl) utilisée par le Samiri.

Les traces de Moise sont :

  • L’essence du message (jawhar ar-risālah), mais sans son contenu céleste ;
  • Le moule de la Terre Promise (qalb al-Arḍ al-Mawʿūd), mais sans sa réalité spirituelle ;
  • La forme de la révélation (ṣūrat al-waḥy), mais sans l’esprit de la révélation (rūḥ al-waḥy).

Ces traces, ce moule, cette forme ne sont que le reflet et l’image de ce temps terrestre (zamān mādī), ce temps imposé par Iblis (Iblis), éphémère, obstruant la vision de l’éternité (dahr).

Ainsi, nous voyons que cette quarantaine, lorsqu’elle est réalisée dans une perspective de réception (istiqbāl), lorsqu’elle est accomplie dans l’attente d’un événement spirituel qui nous sort de notre temps, du temps terrestre, du temps physique, lorsqu’elle est nourrie par le monde spirituel, par une nourriture céleste (ṭaʿām samāwī), alors elle nous ouvre la vision, elle nous ouvre les portes de l’événement majeur de notre destinée : un événement qui se place hors du temps et qui se matérialise, se manifeste, se concrétise par cette nuit bénie, cette nuit du Décret (Laylatou l-Qadr), cette nuit en dehors du temps.

L’Erreur des Enfants d’Isrâ’îl : Préférer le Terrestre Au Céleste

C’est en ce sens que nous pouvons comprendre l’erreur des Enfants d’Isrâ’îl durant leur quarantaine :

Ils ont préféré à la nourriture céleste une nourriture terrestre, semblable à celle qu’ils connaissaient sous l’esclavage de Pharaon.

Ils ont rejeté la manne et les cailles (al-mann wa-s-salwā), cette nourriture que Dieu avait fait descendre des cieux pour eux, lui préférant une nourriture terrestre : concombres, ail, blé, lentilles, oignons, comme le disent les versets 57 et 61 de la Sourate Al-Baqara :

« Et Nous vous couvîmes de l’ombre d’un nuage, et fîmes descendre sur vous la manne et les cailles : « Mangez des délices que Nous vous avons attribués. » Ce n’est pas à Nous qu’ils firent du tort, mais à eux-mêmes.
Et lorsque vous dites : « Ô Moise, nous ne pouvons plus supporter une seule nourriture ! Prie donc ton Seigneur pour qu’Il nous fasse sortir de la terre ses produits : ses légumes, ses concombres, son ail, ses lentilles et ses oignons. »
Il répondit : « Voulez-vous échanger ce qui est meilleur contre ce qui est inférieur ? Descendez donc en Égypte, vous y trouverez certainement ce que vous demandez. »
L’avilissement (adhillah) et la misère (maskanah) s’abattirent sur eux. Ils encoururent la colère de Dieu (ghaḍab Allāh).
Cela, parce qu’ils reniaient les signes de Dieu (ākhirū bi-āyāt Allāh) et qu’ils tuaient sans droit les prophètes (yaqtulūna l-anbiyā’ bi-ghayri ḥaqq).
Cela, parce qu’ils désobéissaient (ʿaṣaw) et transgressaient (kaānū yaʿtadūn). »

Conclusion

En somme, cette histoire de Moise et des Enfants d’Isrâ’îl nous enseigne une leçon essentielle à garder à l’esprit durant la quarantaine : il s’agit d’entrer dans une station d’attente, d’inertie et d’arrêt, où c’est Dieu qui nous nourrit, qui abreuve notre cœur par la révélation, qui nous ouvre les yeux par la vision d’une éternité sortant du temps terrestre, qui nourrit notre ouïe dans l’écoute d’un langage, d’une parole divine qui vient nous éduquer, nous construire et nous transformer, afin de nous préparer à ce rendez-vous, à cette rencontre, à cet événement.

La quarantaine nous invite à suspendre le temps terrestre pour accueillir le céleste, à rejeter les illusions du Veau d’or pour embrasser la nuit du Destin, en évitant l’erreur des Enfants d’Isrâ’îl qui ont préféré le terrestre au divin.

« La nuit bénie, la nuit du Destin, la nuit du Cadre (Laylatou l-Qadr). »

Que la paix de Dieu soit avec vous.
Je vous dis à très bientôt.

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