L'Œuvre Réparatrice : Comprendre al-Amal as-saliḥ
Introduction
« L'œuvre réformatrice, l'œuvre réparatrice, l'œuvre vivante, l'œuvre qui transforme. »
Mes frères et mes sœurs, que la paix de Dieu soit sur vous. Après avoir cherché refuge en Dieu contre Satan, le lapidé, et avoir évoqué le nom de Dieu, ainsi que la prière et les salutations sur le noble messager et sa sainte famille, je reviens vers vous avec ce thème récurrent dans le livre de Dieu. C'est un terme qui n'est pas évident à traduire en français, et il est important de le dissocier d'un autre mot, ḥasanāt ou al-‘amal al-ḥasan, qu'on traduirait par l'œuvre pieuse, faire une bonne action.
Tout d'abord, mes plus sincères condoléances à la famille de notre frère Yahya Bono ou Yahya Ralawi. Nous avons appris cette semaine la triste nouvelle de sa disparition, et ça nous a touchés. Nous avions fait un message sur Facebook pour témoigner. On avait eu l'occasion d'accueillir avec Sayyid Yahya Gouasmi, ainsi que Shabdel Krim Kalid, Yahya ici au centre Zahra, et on a passé un moment formidable ensemble. La séparation est toujours une tristesse. Inna lillahi wa inna ilayhi raja'un, nous appartenons à Dieu, c'est vers lui que nous retournerons. Rahmatullahi ta'ala alayhi, que Dieu le couvre de sa miséricorde et qu'il soit uni avec ceux qu'il aime. Mes sincères condoléances à tous les frères et sœurs de notre grande communauté.
Distinction entre les Bonnes Actions et l'Œuvre Réparatrice
Al-‘amal al-ḥasan, c'est-à-dire faire les bonnes actions, cela on les compte. Un, deux, trois, tu as fait dix ḥasanettes, vingt ḥasanettes, trente ḥasanettes, etc. Il faut faire des ḥasanettes, bien sûr. Mais si vous vous limitez uniquement aux ḥasanettes, le jour du jugement, ce sera des comptes. Un, deux, trois, puis sur la balance, tu as fait vingt ḥasanettes et vingt sayyi’āt, c'est-à-dire des péchés ou des mauvaises actions, ou trente sayyi’āt et vingt ḥasanettes. Selon le nombre que tu as accompli, Dieu jugera en toute équité.
Mais l'‘amal ṣāliḥ, ça n'a rien à voir avec ça. « Faire une bonne action et faire une œuvre réparatrice et transformatrice, ce sont deux choses qui sont complètement différentes. » Al-‘amal al-ḥasan, les ḥasanāt, c'est faire ce que nous devons faire. Donner l'aumône, faire Sadaqa, faire nos prières, être bon avec les gens. Ce sont des bonnes actions, des choses bien que le croyant lui est demandé de faire. C'est le niveau basique, le strict minimum pour quelqu'un qui croit en Dieu et qui souhaite le bien.
Par contre, al-‘amal aṣ-ṣāliḥ, c'est beaucoup plus que ça. C'est faire quelque chose qui va transformer, réparer, régler une situation, régler un problème. Ça demande un effort et une prise de responsabilité de la part de celui qui accomplit cette chose-là. Déjà, ça montre le caractère supérieur par rapport à la simple bonne action. Parce que là, nous participons à construire quelque chose. L'amal al-ḥasan, nous produisons du bien. Mais l'amal aṣ-ṣāliḥ, nous transformons, nous participons à la construction.
Le Verset de la Sourate Al-Baqara et les Gens de Bien
Pour illustrer ça, regardons un verset du Coran, le verset 130 de la Sourate Al-Baqara, la Génisse. « Qui donc aura en aversion la religion d'Abraham, al-millah, sinon celui qui sème son âme dans la sottise. Car très certainement, nous l'avons choisi, istafā, dans ce monde, fid dunya, dans le monde que nous connaissons, le monde sensible. Et dans l'au-delà, la min as-sâliḥîn du nombre des gens de bien. »
Ce terme est extraordinaire, mes frères et mes sœurs, parce qu'il définit une personnalité : as-sâliḥ ou as-sâliḥîn. Les prophètes étaient des sâliḥîn, nos imams étaient des sâliḥîn, des hommes qui corporalisaient l'œuvre transformatrice ou l'œuvre réparatrice. On le trouve dans la Sourate al-‘Aṣr : ceux qui croient et accomplissent les œuvres réparatrices. Et dans les prières des prophètes : « Fais-moi, fasse que je fasse partie des sâliḥîn. »
Il y a d'autres termes nobles comme al-muttaqîn, les éveillés, al-mukhlisîn, ceux qui pratiquent le tawḥîd le plus pur, al-muhsinîn, ceux qui font le bien. Mais aujourd'hui, l'objet du propos, c'est le terme sâliḥ, sâliḥîn.
L'Histoire de Khidr dans la Sourate Al-Kahf
Pour mieux comprendre, on survolle l'histoire de Moise avec l'‘Abd Saliḥ, celui qu'on nomme communément Al-Khidr, dans la Sourate Al-Kahf, la Caverne. Al-Khidr, alayhis salam, que la paix de Dieu soit sur lui, fait un certain nombre de choses. Il est le ṣāliḥ par excellence, l'exemple type du ṣāliḥ dans le Coran. Il y a les histoires avec le bateau, avec les orphelins et l'enfant. Ces versets nous aident à saisir ce qu'est l'‘amal aṣ-ṣāliḥ.
Al-Khidr agit d'une manière qui transforme les situations, répare ce qui semble injuste ou problématique. Il n'est pas dit qu'il ne faisait pas partie des sâliḥîn sur terre, il faisait sûrement partie des sâliḥîn sur terre. Mais comment ṣāliḥ dans l'au-delà ? Théoriquement, cette terre est faite pour agir, travailler, se donner, faire des efforts, et l'au-delà c'est la récolte. Dans l'au-delà, il n'y a plus matière à travailler et accomplir des œuvres réparatrices.
Comprendre l'Au-Delà et les Sâliḥîn
Tout cela a un rapport avec notre compréhension de l'au-delà, l'ākhirah. Il y a un verset, je pense dans la Sourate al-‘Ankabût, qui dit : « Ils connaissent ce qui est apparent de la vie de ce monde mais ils sont inattentifs à l'au-delà. » Le fait qu'il emploie le terme inattentif, ça ne veut pas dire que l'au-delà n'est pas présent. C'est nous qui ne sommes pas présents à l'au-delà.
« L'ākhirah aujourd'hui, il est présent. Cet au-delà, il n'est pas un futur. Cet au-delà, il est indépendant du futur, du passé et du présent. Et il est présent à chaque instant. » Si nous comprenons cela, ça nous donne une piste pour pourquoi Abraham est un ṣāliḥ dans le monde de l'ākhirah. Et si l'‘amal ṣāliḥ c'est une transformation, une participation à la construction, alors comment participer dans l'au-delà ? Est-ce que l'au-delà nous permet de transformer ce qui se passe ici, dans ce bas-monde ?
Tout est décidé ici, certes, mais tout peut se changer et se transformer, mais pas à partir d'ici, à partir de là-bas. Une majorité des prophètes demandent pour faire partie des sâliḥîn, ou Dieu dit qu'ils en font partie. Et le dernier verset de la Sourate Al-Kahf dit : « Et que celui qui l'accomplisse une seule action réparatrice. » Pourquoi une bonne action ? Parce que lorsque nous avons compris l'importance de l'‘amal ṣāliḥ, que son influence se fait dans l'au-delà, et qu'en agissant de l'autre côté, nous transformons ici, alors nous comprenons toute la subtilité de cette œuvre.
« Une seule œuvre réparatrice, eh bien, ça vaut, je ne sais pas quel prix, mais tellement c'est extra. » Quel espoir cela nous donne ? Quelle grandeur Dieu donne à l'homme à travers cette action ?
L'Héritage de la Terre pour les Serviteurs Réparateurs
Dieu dit, dans la Sourate Al-Anbiyâ’, verset 105 : « Et nous avons certes écrit dans le Zabur, après l'avoir mentionné dans le Dhikr, que la terre sera héritée par mes bons serviteurs. » Ce sont al-‘ibād as-sâliḥûn, mes serviteurs qui accomplissent les œuvres réparatrices.
C'est à travers ces œuvres que Dieu donne à l'homme la possibilité de transcender le temps et d'agir d'une manière qui n'est pas raisonnable. Il faut abolir la raison, avoir besoin d'une initiation, aller au-delà. Il faut l'intervention du cœur, un effort qui vient du cœur, l'intervention de la miséricorde de Dieu. Il faut l'intention de servir Dieu sincèrement, être dans une démarche spirituelle de recherche après Dieu, à connaître Dieu, à être dans sa proximité, parmi ses serviteurs.
Ceci est la démarche de l'âme, nafs al-mutma'innah, l'âme pacifiée qui est agréante et agréée. C'est à ce niveau que nous devons nous placer, travailler et faire des efforts pour réaliser la grandeur que Dieu a mise en l'homme, le pouvoir extraordinaire pour réformer cette terre, pas seulement dans l'espace, mais même dans le temps.
Comment Atteindre le Statut de Sâliḥ
Vous allez me dire, l'âme sâliḥ a un rapport avec l'au-delà, j'ai compris, et les ḥasanāt c'est ici, pour me construire, être meilleur, honorer mes engagements vis-à-vis de Dieu. À quoi sert l'amal ṣāliḥ ? Comment l'atteindre ?
Eh bien, c'est en pratiquant et accumulant les ḥasanāt, en faisant des efforts sur soi-même, en témoignant, en apportant le meilleur. Tout ce que vous faites vous aide à purifier votre âme pour élever au statut de l'âme qui, quand elle retourne, a un rapport direct avec l'ākhirah. Et c'est dans cet ākhirah que tout se passe pour l'amal ṣāliḥ.
- Ne pensez pas maintenant : « Il faut que je fasse un amal ṣāliḥ », ce n'est pas comme ça.
- Pour les ḥasanāt, oui : « Allez, je vais faire une bonne action, donner une Sadaqa, faire du bien à mon frère, rentrer la joie dans le cœur de ma sœur. »
- Mais un amal ṣāliḥ, c'est un niveau à atteindre, qui a un rapport direct avec la purification de l'âme.
Tout ce que je fais ici me permet d'atteindre un degré qui va permettre à mon âme de retourner vers ce monde d'où nous venons. Et à travers lequel, quand nous y sommes spirituellement, nous transformons les choses ici sur cette terre, mais à partir de là-bas. C'est exactement ce que fait Al-Khidr, l'‘Abd Saliḥ, dans l'histoire de Moise.
Conclusion
Mes frères et mes sœurs, al-‘amal aṣ-ṣāliḥ est bien plus qu'une bonne action : c'est une œuvre transformatrice qui répare, construit, et transcende le temps via l'au-delà. Elle se distingue des ḥasanāt par son effort profond et sa connexion à l'âme pacifiée. En accumulant les bonnes actions ici, on purifie l'âme pour atteindre ce niveau supérieur, hériter la terre comme les serviteurs de bien, et participer à la réforme divine.
Je vous laisse avec cette réflexion, en espérant qu'elle vous touche et vous donne du combustible pour vous nourrir les uns les autres. « Que la terre sera héritée par mes bons serviteurs. »
Que la paix soit sur vous tous, à très bientôt. Assalamu alaykoum wa rahmatullahi wa barakatuh.






