L’Homme de la fin des temps : Les Deux Jardins (épisode 6)

11 octobre 2025
Par Seyyed Fouzi
Exégèse Coranique
Spiritualité Islamique
Eschatologie Islamique
Sourate Caverne
Tawhid
Âme
Adam
Iblis

Versets Cités (11)

۞ وَٱضْرِبْ لَهُم مَّثَلًا رَّجُلَيْنِ جَعَلْنَا لِأَحَدِهِمَا جَنَّتَيْنِ مِنْ أَعْنَـٰبٍ وَحَفَفْنَـٰهُمَا بِنَخْلٍ وَجَعَلْنَا بَيْنَهُمَا زَرْعًا

wa-iḍ'rib lahum mathalan rajulayni jaʿalnā li-aḥadihimā jannatayni min aʿnābin waḥafafnāhumā binakhlin wajaʿalnā baynahumā zarʿan

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

Donne-leur l'exemple de deux hommes: à l'un d'eux Nous avons assigné deux jardins de vignes que Nous avons entourés de palmiers et Nous avons mis entre les deux jardins des champs cultivés.

كِلْتَا ٱلْجَنَّتَيْنِ ءَاتَتْ أُكُلَهَا وَلَمْ تَظْلِم مِّنْهُ شَيْـًٔا ۚ وَفَجَّرْنَا خِلَـٰلَهُمَا نَهَرًا

kil'tā l-janatayni ātat ukulahā walam taẓlim min'hu shayan wafajjarnā khilālahumā naharan

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

Les deux jardins produisaient leur récolte sans jamais manquer. Et Nous avons fait jaillir entre eux un ruisseau.

وَكَانَ لَهُۥ ثَمَرٌ فَقَالَ لِصَـٰحِبِهِۦ وَهُوَ يُحَاوِرُهُۥٓ أَنَا۠ أَكْثَرُ مِنكَ مَالًا وَأَعَزُّ نَفَرًا

wakāna lahu thamarun faqāla liṣāḥibihi wahuwa yuḥāwiruhu anā aktharu minka mālan wa-aʿazzu nafaran

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

Et il avait des fruits et dit alors à son compagnon avec qui il conversait: «Je possède plus de biens que toi, et je suis plus puissant que toi grâce à mon clan».

وَدَخَلَ جَنَّتَهُۥ وَهُوَ ظَالِمٌ لِّنَفْسِهِۦ قَالَ مَآ أَظُنُّ أَن تَبِيدَ هَـٰذِهِۦٓ أَبَدًا

wadakhala jannatahu wahuwa ẓālimun linafsihi qāla mā aẓunnu an tabīda hādhihi abadan

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

Il entra dans son jardin coupable envers lui-même [par sa mécréance]; il dit: «Je ne pense pas que ceci puisse jamais périr,

قَالَ لَهُۥ صَاحِبُهُۥ وَهُوَ يُحَاوِرُهُۥٓ أَكَفَرْتَ بِٱلَّذِى خَلَقَكَ مِن تُرَابٍ ثُمَّ مِن نُّطْفَةٍ ثُمَّ سَوَّىٰكَ رَجُلًا

qāla lahu ṣāḥibuhu wahuwa yuḥāwiruhu akafarta bi-alladhī khalaqaka min turābin thumma min nuṭ'fatin thumma sawwāka rajulan

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

Son compagnon lui dit, tout en conversant avec lui: «Serais-tu mécréant envers Celui qui t'a créé de terre, puis de sperme et enfin t'a façonné en homme?

لَّـٰكِنَّا۠ هُوَ ٱللَّهُ رَبِّى وَلَآ أُشْرِكُ بِرَبِّىٓ أَحَدًا

lākinnā huwa l-lahu rabbī walā ush'riku birabbī aḥadan

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

Quant à moi, c'est Allah qui est mon Seigneur; et je n'associe personne à mon Seigneur.

وَلَوْلَآ إِذْ دَخَلْتَ جَنَّتَكَ قُلْتَ مَا شَآءَ ٱللَّهُ لَا قُوَّةَ إِلَّا بِٱللَّهِ ۚ إِن تَرَنِ أَنَا۠ أَقَلَّ مِنكَ مَالًا وَوَلَدًا

walawlā idh dakhalta jannataka qul'ta mā shāa l-lahu lā quwwata illā bil-lahi in tarani anā aqalla minka mālan wawaladan

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

En entrant dans ton jardin, que ne dis-tu: «Telle est la volonté (et la grâce) d'Allah! Il n'y a de puissance que par Allah». Si tu me vois moins pourvu que toi en biens et en enfants,

فَعَسَىٰ رَبِّىٓ أَن يُؤْتِيَنِ خَيْرًا مِّن جَنَّتِكَ وَيُرْسِلَ عَلَيْهَا حُسْبَانًا مِّنَ ٱلسَّمَآءِ فَتُصْبِحَ صَعِيدًا زَلَقًا

faʿasā rabbī an yu'tiyani khayran min jannatika wayur'sila ʿalayhā ḥus'bānan mina l-samāi fatuṣ'biḥa ṣaʿīdan zalaqan

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

il se peut que mon Seigneur, bientôt, me donne quelque chose de meilleur que ton jardin, qu'Il envoie sur [ce dernier], du ciel, quelque calamité, et que son sol devienne glissant,

وَأُحِيطَ بِثَمَرِهِۦ فَأَصْبَحَ يُقَلِّبُ كَفَّيْهِ عَلَىٰ مَآ أَنفَقَ فِيهَا وَهِىَ خَاوِيَةٌ عَلَىٰ عُرُوشِهَا وَيَقُولُ يَـٰلَيْتَنِى لَمْ أُشْرِكْ بِرَبِّىٓ أَحَدًا

wa-uḥīṭa bithamarihi fa-aṣbaḥa yuqallibu kaffayhi ʿalā mā anfaqa fīhā wahiya khāwiyatun ʿalā ʿurūshihā wayaqūlu yālaytanī lam ush'rik birabbī aḥadan

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

Et sa récolte fut détruite et il se mit alors à se tordre les deux mains à cause de ce qu'il y avait dépensé, cependant que ses treilles étaient complètement ravagées. Et il disait: «Que je souhaite n'avoir associé personne à mon Seigneur!»

وَلَمْ تَكُن لَّهُۥ فِئَةٌ يَنصُرُونَهُۥ مِن دُونِ ٱللَّهِ وَمَا كَانَ مُنتَصِرًا

walam takun lahu fi-atun yanṣurūnahu min dūni l-lahi wamā kāna muntaṣiran

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

Il n'eut aucun groupe de gens pour le secourir contre (la punition) d'Allah. Et il ne put se secourir lui-même.

هُنَالِكَ ٱلْوَلَـٰيَةُ لِلَّهِ ٱلْحَقِّ ۚ هُوَ خَيْرٌ ثَوَابًا وَخَيْرٌ عُقْبًا

hunālika l-walāyatu lillahi l-ḥaqi huwa khayrun thawāban wakhayrun ʿuq'ban

Traduction :
Muhammad Hamidullah
Rachid Maach
Centre International Nur

En l'occurrence, la souveraine protection appartient à Allah, le Vrai. Il accorde la meilleure récompense et le meilleur résultat.

La Parabole des Deux Jardins : Dualité en l’Homme et Illusions de la Civilisation

Introduction

« Au nom de Dieu, ar-ar-Raḥman, le Clément, salutations fraternelles à tous. »

Bienvenue dans ce nouvel épisode de notre série qui porte sur une réflexion autour de l’homme. Nous avons vu, dans l’épisode précédent, que l’homme, lorsqu’il fait le choix d’évoluer en occultant la nature que Dieu lui a donnée, d’évoluer par ses propres moyens, d’évoluer grâce à ses outils de réflexion et d’analyse – qui sont apparus du fait de la désobéissance de notre père Adam –, le mieux qu’il puisse accomplir, le summum, c’est une civilisation éphémère ayant l’illusion d’un paradis, d’une hauteur et d’une grandeur qui ne peut être égalée ou dépassée.

Enjolivant ses actions, ses possessions et le monde qu’il s’est construit, l’homme oublie que c’est Dieu qui l’a créé et qu’Il lui a tout donné. À l’instar de cette histoire, de cet exemple, de cette parabole que Dieu nous donne dans la révélation : l’histoire des deux jardins.

La Parabole des Deux Jardins dans la Sourate al-Kahf

En effet, dans la Sourate al-Kahf, à partir du verset 32, Dieu nous dit :
« Donne-leur en exemple deux hommes. À l’un d’eux, Nous avons assigné deux jardins de vignes que Nous avons entourés de palmiers, et Nous avons placé entre les deux jardins des champs cultivés. Les deux jardins produisaient leur récolte sans jamais manquer, et Nous avons fait jaillir entre eux un ruisseau. »

Nous voyons ainsi que Dieu prend en exemple deux hommes. Ces deux hommes, nous les symbolisons aujourd’hui par cette dualité dont nous avons parlé dans l’épisode précédent.

Les Deux Visages de l’Homme

  • L’un se construisant par lui-même, comptant sur ses efforts, sa puissance, son clan, ses biens pour s’élever et acquérir un rang supérieur. À l’image des grandes civilisations qui ont jalonné l’histoire de notre humanité.
  • L’autre, éveillé en Dieu, conscient de ce qu’il est et reconnaissant envers son Créateur.

À celui-ci, Dieu a donné ces deux jardins dans lesquels Il a tout mis pour son bien-être : un ruisseau, des fruits, des palmiers, des récoltes en abondance, lui offrant par Sa grâce un environnement propice à son confort et à son épanouissement.

Pourtant, cet homme pense que tout cela est le résultat de son travail, de ses efforts, et que ses bienfaits lui sont acquis pour toujours. Séduit par cette beauté, ce confort et cette puissance qu’il a acquis à travers son clan, sa civilisation, il croit dominer le monde et les hommes par sa puissance et ses richesses.

Et il y avait des fruits, dit-il alors à son compagnon avec qui il conversait :
« Je possède plus de biens que toi, et je suis plus puissant que toi grâce à mon clan. »

Il entra dans son jardin, coupable envers lui-même, et dit :
« Je ne pense pas que ceci puisse jamais périr, et je ne pense pas que l’Heure viendra. Et si jamais je suis ramené vers mon Seigneur, je trouverai certes un meilleur lieu de retour que ce jardin. »

Le Rappel du Compagnon

Son compagnon lui répondit, tout en conversant avec lui :
« Serais-tu de ceux qui renient Celui qui t’a créé de terre, puis de sperme, puis t’a façonné en homme ? »

Ainsi, cet homme croit posséder un bien, un royaume, une civilisation impérissables, ainsi qu’une hauteur et une stature inégalables. Lorsqu’il affirme que son jardin ne pourra jamais périr et qu’il ne peut y avoir rien de mieux, il tombe dans la séduction d’Iblis.

Tout comme Iblis a promis à notre père Adam le rang des anges et l’immortalité s’il touchait à cet arbre interdit, il a enjolivé les actions et les biens de cet homme. L’homme montre alors toute l’étendue de son arrogance, de sa cupidité, de son avarice et de son injustice, qui le caractérisent lorsqu’il pense avoir atteint l’apogée de sa puissance, de sa civilisation.

Mais un rappel lui est donné par son compagnon, comme le disent les versets suivants :
« Mais c’est Lui, Allah, qui est mon Seigneur, et je n’associe personne à mon Seigneur. Si seulement, en entrant dans ton jardin, tu avais dit : “Telle est la volonté d’Allah ! Il n’y a de puissance qu’en Allah !” En me voyant moins pourvu que toi en biens et en enfants, il se peut que mon Seigneur, bientôt, me donne quelque chose de meilleur que ton jardin : qu’Il envoie sur celui-ci, du ciel, quelques calamités, ou que son sol devienne glissant, ou que son eau tarisse, de sorte que tu ne puisses plus la retrouver. »

Ainsi, son compagnon lui rappelle :

  • Sa nature, sa création, ses origines ;
  • Que c’est Dieu qui donne ce qu’Il veut, à qui Il veut ;
  • Que Dieu reprend ce qu’Il veut, quand Il le veut ;
  • Que ce ne sont ni sa puissance, ni ses biens, ni sa richesse qui font de l’homme un homme ;
  • Que tous ses acquis, ses biens, sa civilisation ne sont ni éternels, ni aussi élevés qu’il pourrait le penser ;
  • Qu’il existe quelque chose de plus grand, de plus haut, de meilleur pour l’homme, que Dieu réserve à ceux qu’Il choisit.

Les Conséquences et la Leçon Divine

Et c’est alors que la parole de son compagnon devient créatrice, comme le dit la suite de cette parabole :
« Sa récolte fut détruite, et il se mit à se tordre les mains à cause de ce qu’il avait dépensé, tandis que ses treilles étaient complètement ravagées. Et il disait : “Que je souhaite n’avoir associé personne à mon Seigneur !” Il n’eut aucun groupe pour le secourir, en dehors d’Allah, et il ne put être secouru. En ce lieu, la souveraine protection appartient à Allah, le Vrai. C’est Lui la meilleure récompense et le meilleur résultat. »

Ainsi, l’histoire des deux jardins nous rappelle cette dualité ancrée en l’homme. Nous nous plaçons, chacun d’entre nous, à des degrés plus ou moins variés, dans l’un de ces deux personnages.

Aujourd’hui, avec cette civilisation de l’intelligence artificielle qui commence à apparaître, il est nécessaire que les hommes éveillés – à la recherche de l’inspiration et de la révélation – témoignent et rappellent, à l’image de ce compagnon :

  • À notre humanité,
  • À cette civilisation de l’intelligence artificielle, avec toute la séduction qu’elle comporte,
    De ne pas oublier :
  1. La nature première que Dieu a conférée à l’homme ;
  2. Que, malgré le confort et le bien-être qu’elle apporte, cette civilisation n’aura que l’illusion d’un faux paradis ;
  3. Qu’elle n’aura que l’illusion d’une hauteur et d’une grandeur appelées à disparaître inévitablement.

Conclusion

Cette histoire, cet exemple, cette parabole des deux jardins : nous devons tous nous y arrêter, tous y méditer profondément. Car elle comporte en elle un mystère, un secret, qui nous permettra, si Dieu le veut, d’y goûter, afin de mieux comprendre ce qu’est l’homme, mieux comprendre ce que nous sommes, mieux comprendre les enjeux eschatologiques auxquels nous sommes confrontés.

« Que la paix de Dieu soit avec vous. »

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